L'impression à la planche de bois
Durant les dix premières années (1760-1770) de la manufacture d'Oberkampf à Jouy-en-Josas, l'impression à la planche de bois fut la seule technique utilisée, permettant des impressions polychromes. Provenant de France, de Suisse, des Indes, la toile écrue était d'abord lavée dans l'eau de la Bièvre, puis battue au fléau pour la débarrasser de son apprêt (plus tard, des batteries mécaniques remplaceront ces manipulations). Une fois séchée, elle passait à la calandre pour en aplanir le grain. Venait alors l'application des planches de bois sur lesquelles les motifs avaient été gravés en relief (principe du tampon). Ce n'étaient pas les couleurs elles-mêmes que l'imprimeur appliquait sur la toile mais différents mordants — principalement sels de fer et d'alumine — qui permettraient l'obtention des couleurs désirées.
Après l'impression, la toile était plongée dans un bain de bouse de vache ayant la propriété d'éliminer l'excès d'épaississant, de décomposer et de fixer les mordants sur la fibre de coton. Lavée une nouvelle fois, elle passait ensuite dans un bain de teinture rose clair — décoction de racines de garance — qui, porté à ébullition, révélait les couleurs sur les parties de toile empreintes de mordants. Par ce garançage, on obtenait une gamme de couleurs allant du rouge foncé au rose tendre, du noir au lilas, violet, bistre. Le jaune et le bleu étaient imprimés directement sur la toile. Le vert était obtenu par superposition de bleu et de jaune jusqu'en 1808, date à laquelle Samuel Widmer, neveu d'Oberkampf, découvrit le « vert solide » bon teint en une seule application. Enfin, la toile, dont le fond était devenu rosâtre, devait être étendue au soleil sur les prés alentours pour blanchir.
Après le travail de finition — détails et autres couleurs — opéré par les pinceauteuses, certaines pièces recevaient un apprêt. Composé d'un mélange de cire et d'amidon, il était appliqué sur la toile qui passait ensuite à la calandre à chaud. Pour satiner ces pièces, elles étaient lissées à la bille d'agate ou de cristal fixée à l'extrémité d'un bras articulé — le lissoir.
L'impression au cadre, ou à la plaque de cuivre
À partir de 1770, une nouvelle technique apparut à Jouy-en-Josas : l'impression au cadre, qui permettait d'obtenir, selon le principe du pochoir et en une seule application d'une plaque de cuivre gravée au burin en taille douce, de grands motifs au dessin très délicat : ce fut le début des scènes à personnages qui ont rendu les toiles de Jouy si célèbres dans le monde. Comme pour la technique à la planche, il faut autant de cadres qu'il y a de couleurs ou de nuances dans le dessin.
L'impression au rouleau de cuivre
En 1797, un récent brevet écossais fut mis en application, remplaçant la plaque par une mécanisation : l'impression au rouleau de cuivre. Gravé en taille douce, il fallait six mois aux meilleurs graveurs pour réaliser un tel cylindre. La nouvelle machine, baptisée familièrement « bastringue » par les ouvriers, fonctionnait en continu, permettant la production de 5 000 mètres de toile par jour, soit un gain de temps considérable par rapport au cadre de cuivre. La production pouvait alors atteindre 1 450 000 mètres en 1805, dont 890 000 mètres au rouleau. Malheureusement, la plupart de ces cylindres ont aujourd'hui disparu, au fil des ans et des guerres, et seuls subsistent quelques modèles visibles dans certains musées de par le monde.
Paradoxalement, il est probable que cette modernisation des techniques d'impression des toiles ait directement contribué à la disparition des toiles de Jouy et, notamment, à la fermeture de la manufacture d'Oberkampf en 1843. La mécanisation a permis la production de toiles à bon marché, de ce fait dévalorisées, dont le caractère de produit de luxe ou de pièce unique apparaissait désormais moins marqué.